le monde s'engouffrait dans le centre de l'art contemporain. certains d'entre eux portaient des appareils photo et des habits reconnaissables à des touristes. d'autres venaient voir les exposant avec seulement leur affaires les plus précieuses. un porte-monnaie, les clés de la voiture, des lunettes de soleil, un rouge à lèvre. ils habitaient ici depuis pas mal d'années ou venaient tout juste d’emménager. et parmi eux, chiara pouvait sentir l'odeur rance du sang. c'était une sensation inexplicable, mais elle était capable de le sentir depuis n'importe quelle direction. c'était comme s'ils l'encerclaient et qu'ils étaient prêts à se jeter sur elle.
la métisse trembla quelque peu avant de déglutir difficilement. elle essaya de calmer ses ardeurs en inspirant et expira à grandes voluptés. seulement, son coeur n'arrêtait pas de battre comme une balle de ping pong sur une table de professionnels.
- shit.
elle planta ses deux mains sur le bureau qui lui servait également à exposer et regarda un moment dans le vide. elle avait peur, extrêmement peur, comme toutes ces fois où elle sortait dans les rues de sa ville ou bien qu'une personne entrait dans sa boutique. chiara avait grandi dans la frayeur, dans la méfiance à autrui. sa mère s'était arrangée pour qu'elle ne voit jamais le monde autour d'elle et quand la lafayette sortait de sa tanière, le malaise s'accentuait et la détruisait à petit feu.
- pff, j'aurais pas du venir.
chiara se maudissait. et ce n'est que lorsqu'elle prit l'initiative d'attraper sa bédane qu'elle se sentit un peu mieux. les muscles se relâchèrent et elle grimaça. il lui suffisait d'avoir une quelconque arme à la main pour se sentir en sécurité, comme si son marteau ou son couteau japonais allaient la sauver des suceurs de sang ou autre ennemis juré. c'est alors qu'elle aperçut du coin de l'oeil quelqu'un fixer ses sculptures en bois. chiara inspira un grand coup et releva la tête comme si rien n'était, le sourire aux lèvres.
- bonjour.
elle essaya de capter son regard, comme un commerçant le fait avec un potentiel client. en réalité, elle aurait bien voulu d'un peu de compagnie. une discussion ne serait pas de refus. depuis ce matin, c'est à peine si l'on lui demandait d'où venait le bois, quels instruments elle utilisait, etc. elle avait l'impression que ça n'intéressait personne et pourtant elle avait cette envie de partager sa passion et celle de l'homme qu'elle avait aimé fut un temps.